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28 Fév 25 Avant-première – Ventura – ‘Superheld’
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Depuis ses débuts en 2003, Ventura arpente un même chemin qu’il décrit sous de nouveaux aspects via chacun de ses disques. De Pa Capona (2006) au plus introspectif Ad Matres (2019), le groupe suisse a ainsi jalonné son parcours de quatre albums faisant écho les uns aux autres, résistant autant à l’usure du temps qu’aux tendances. On se souvient aussi de sa collaboration avec David Yow (The Jesus Lizard) dont le titre It’s Rainning On One of My Islands résonne encore douze ans après sa sortie. Identifiable dès ses premiers accords, qu’il soit en lévitation ou plus engagé dans son post hardcore, le trio a cette faculté à écrire des morceaux impérissables, des lignes en équilibre entre puissance et sensibilité à fleur de peau, que Superheld vient à présent augmenter de fort belle manière. Mis de nouveau en relief par l’oreille attentive et complice de Serge Morattel, son fidèle compagnon de studio, le groupe réinjecte naturellement ses principes dans ce cinquième chapitre de son existence : la connivence guitare-basse reprend immédiatement ses marques, appuyée autant par son socle rythmique solidement amarré que par son chant toujours en quête d’altitude, tous reconnaissables et authentiques à l’endroit exact où ils nous avaient laissés six ans auparavant.
Un tantinet plus agressifs que sur leur dernier album, les suisses retrouvent avec ces nouveaux titres l’énergie et la flamboyance de l’époque We Recruit (2010), période durant laquelle ils misaient davantage sur le côté massif de leurs intentions, et ce dès l’entame Dwell ouvrant crescendo la voie au plus volontaire Advertiser, le tubesque Most Arts, Patron Saint au riff métal inattendu, et le titanesque Obviously. Mais Superheld s’offre aussi aux reliefs changeants. Les trois jouent plus en retenue sur un Bubbles au cap slowcore volontairement orienté vers un final étourdissant, ou encore dans des approches acoustiques plus inédites, concrétisées par le plus conventionnel Freeze In Hell, et le plus bancal Optimistic, lui aussi prêt à hérisser les poils.
On aurait pu craindre qu’en plus de vingt ans d’exercice à toujours défricher le même sentier, Ventura finirait par tourner en rond. Heureusement, il n’en est rien. Toujours inspiré dans son éternelle modulation têtue, le groupe traverse ses nouvelles compositions bien vissé au présent, avec toujours autant de classe et de clarté émotionnelle. Si vous cherchez l’originalité avant-gardiste, passez votre tour, le post-hardcore de Ventura agit(e) ailleurs. Il travaille à l’endroit des ressentis les plus profonds, grâce à une attention particulière portée aux mélodies pures et racées, jusqu’à trouver avec From Evil, son ‘petit clin d’oeil à Swell‘, la sortie indispensable à sa splendeur mélancolique. Un coup de maitre.
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