
16 Mar 25 Troy Von Balthazar – ‘Aloha Means Goodbye’
Album / Vicious Circle / 07.03.2025
Pop lofi
Pour l’avoir longtemps vu se contorsionner sur scène, s’arcbouter face à la puissance des amplis de Chokebore, on imaginait mal Troy Von Balthazar plus assez souple pour esquiver les petits soucis de la vie. L’an passé, le hawaïen a pourtant plié jusqu’à être à deux doigts de rompre, jusqu’à ce qu’il envisage que ce Aloha Means Goodbye, nouvel album solo auquel il s’est accroché comme un gosse peut s’agripper à la jambe de sa mère, soit à jamais son dernier. Mais à l’écoute de ces douze nouveaux titres, sûrement les plus personnels de son oeuvre, on se dit que, plutôt que de se taire à jamais, l’américain a peut être trouvé dans cette période sombre une prise de conscience capable d’ouvrir une nouvelle ère de sa créativité.
Fidèle à sa grande sensibilité, fragile comme un fil qu’il s’amuserait à tirer sans jamais qu’il casse, Troy Von Balthazar tisse encore ici une pop lo-fi des plus instinctives. Et pour cause, chez lui, comme à son habitude, l’inspiration passe en un instant du cerveau à la bande sans étape supplémentaire ni tergiversations inutiles, preuve s’il en fallait une de ses grands talents d’écriture. Si la méthode a de quoi étonner, elle a le mérite de proposer le reflet exact de la véracité de son oeuvre, et d’accueillir ce que l’intéressé apprécie le plus dans sa musique : le minimalisme, comme pour dessiner ses morceaux avec le moins de couleurs possibles, et les petites imperfections qui la rendent définitivement humaine.
A ce titre, Troy tape dans le mille à chaque instant de ce nouvel album composé une heure par ci, une heure par là, quand la douleur ne venait pas l’en empêcher pour le reste de la journée ; ce qui rend plus surprenant encore le sentiment d’apaisement, la douceur dégagée par chacune de ces nouvelles chansons pourtant écrites dans un contexte particulièrement lourd. Il y a ainsi du Hallelujah de Jeff Buckley dans la fluidité des guitares de Hammertime, une mélancolie poignante dans les arrangements (le piano de Her American), des réminiscences de ses origines offertes par le ukulele (Swimmer, Aloha Means Goodbye), et quelques inévitables échos de son esprit décalé (Boom Boom).
Mais, au delà du détail, TVB signe surtout ici quelques magnifiques expressions de son identité musicale singulière. L’habitée Please?, la passionnée I Love Airplanes, la légère Let’s No Forget to Panic au coeur lourd, et la contrastée clôture éponyme sur laquelle un violon et une guitare presque flamenco dansent ensemble, sont autant de chansons que l’intéressé pourrait perfectionner jusqu’à en faire des hits. Sauf qu’elles perdraient certainement chacune cette authenticité si précieuse que le deux fois rien utilisé par leur auteur ne leur fait gagner. A l’heure ou l’obsession du paraitre vient jusqu’à voiler pas mal d’inspirations, saluons bruyamment celle de Troy Von Balthazar à sonner coûte que coûte au plus près de ce qu’il est.
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